FSM, silence radio

Test amusant. Tapez FSM sur les sites d'info de quelques grands quotidiens et le résultat sera zéro. Enfin, presque: quelques vieux articles sur le Forum social mondial mais, donc, rien sur la Fédération syndicale mondiale, dont le 17e congrès s'est achevé ce samedi 8 octobre 2016 après quatre jours de débats et délibérations.

On est là, pourtant, en plein dans l'actualité. Certes, cela se passait à Durban, en Afrique du Sud. Naturellement, c'est un loin. Tapez Durban: vous aurez une brève sur un ter-ri-ble accident de train survenu le 17 août. Mais la FSM, rien, zéro, nada.

Il est permis de trouver cela un peu curieux. La FSM, plus ancienne des internationales syndicales, fondée en 1945, compte 95 millions d'affiliés issus de 126 pays sur les cinq continents. À Durban, ils étaient quelque 1.200 participants. Très largement venus de pays du Tiers-monde, il est vrai. Ce n'est pas très médiatique, ni sexy.

La FSM a beau avoir un secrétaire général grec, George Mavrikos, réélu à Durban, le gros des troupes est actif dans l'hémisphère sud, celle qui ne compte pas, ou si peu. La Chine? Bof. L'Inde, le Vietnam, l'Iran, la Bolivie, Cuba: re-bof. Et c'est pas son statut d'organe consultatif auprès du Conseil économique et social des Nations unies ou de l'Organisation internationale du travail qui va changer la donne. La fédération compte certes assez de bataillons pour s'emparer du Vatican, pour paraphraser l'autre, mais c'est une armée condamnée à être invisible sous nos cieux. Dans le radar des médias occidentaux, pas le moindre frémissement.

Ce qui gêne et rend la FSM peu fréquentable en Occident est qu'elle reste fidèle à l'analyse de classe anticapitaliste du mouvement ouvrier. Dans son allocution introductive, Jacob Zuma, en sa qualité de président du pays hôte, l'Afrique du Sud, s'est référé à Marx pour rappeler que "la classe ouvrière unie n’a rien à perdre mais doit apporter le changement, que "le système capitalisme est un système qui est une crise en soi", que dans son pays "notre première lutte a été pour se libérer de l’apartheid, la deuxième est pour la liberté socio-économique" et enfin que "les progrès ont été permis par les luttes des syndicalistes". Le secrétaire général de la fédération syndicale sud-africaine, pour sa part, a commencé non par des mots, mais par un chant, aussitôt entonné par la sallle. Ça change. Une autre tonalité. Tout autre chose.

Ce que fait, ce que veut la FSM: on ne va s'étendre ici. Sinon donc pour souligner ce fait, plus révélateur qu'étonnant, qu'une organisation syndicale internationale forte de 95 millions d'affiliés (en progression de 14% sur cinq ans) et solidement implantée dans le Tiers-monde se voit complètement ignorée des rédactions dans les capitales occidentales. À se masquer les yeux, on peut s'attendre à des surprises.

Compte-rendu d'un participant français: http://www.rougemidi.org/spip.php?article9420
L'allocution de Mavrikos (en anglais): http://www.cosatu.org.za/show.php?ID=12069
Le site de la FSM (comprenant son rapport 2011-2016): http://www.wftucentral.org/?lang=fr