Lus en Ventôse 2018

Le mois de mars, mois des fantômes? Ils sont quelques-uns, Schiller, de Gaulle, Traven, Lessing, Neruda, Gracq, Berger... En leur qualité de revenants, ils sont tous contemporains, main dans la main avec nous. Le livre - "navire de papier" comme l'exprime Claudio Magris - est l'arche qui nous conduit en haute mer.

1. George Simenon (1903-1989), Les trois crimes de mes amis, 1938, édition Folio 1979, 182 pages, 2 euros (bouquinerie). Ah! Simenon. Il a ses inconditionnels, ses admirateurs - personnellement, c'est plutôt la série télé Maigret avec l'inoubliable regretté Bruno Cremer (1991-2005 - 54 épisodes en coffrets DVD). Ici, on voit Simenon à ses débuts, journaliste à Liège, évoluant dans l'interlope, autour de 1930, avec ses copains et autres figures fantasques, dont trois finiront mal, en assassin ou suicidé, c'est l'histoire qu'il raconte - en notant, perspicace, qu'à l'inverse des personnages de création littéraire, le mobile poussant au crime le quidam: hé ben, on ne sait pas, on ne saura jamais pourquoi. Le meilleur, dans ce roman, est le "climat d'époque", par exemple cet agent de police qui va "de porte en porte, afin de rappeler à ceux qui ne l'avaient pas encore fait qu'il leur fallait arracher les herbes poussant entre les pavés." Ah, mais! C'était au temps où la police œuvrait au bien commun, au lieu de jouer aux cowboys, gyrophare et sirène, toujours en bagnole.

Belle biographie illustrée sur le site de l'Université de Liège (éviter Wikipedia, SVP): https://lib.uliege.be/simenon/biographie/

2. Friedrich von Schiller (1759-1805), Don Carlos, 1787, édition Folio 2004 dans la traduction revue de Xavier Marmier, présentée par Jean-Louis Backès, 393 pages, 9 euros. Imaginez que vous êtes dingue fou amoureux d'une femme sans laquelle vous ne sauriez un seul instant encore vivre (ou dingue folle amoureuse de l'homme, etc.) et que papa (ou maman) prend votre place et l'épouse et puis, pire: en fait votre mère (ou père), l'horreur absolue, à se flinguer ou se noyer dans l'alcool. Déjà sous cet angle, Don Carlos est envoûtant. Mais il y a aussi la langue, sublime même en traduction (l'original, en vers et au rythme iambique de Shakespeare, doit l'être encore plus, faudra se le procurer, ce sera pour une autre fois). Et puis, enfin, c'est l'arrière-plan historique, assez proche de Tijl Uilenspiegel, contexte de guerre de libération, l'Espagne inquisitoriale et totalitaire de Philippe II, père de Don Carlos, qu'on voit comme le champion désigné de la Flandre opprimée et qui, pour cela, mais aussi à cause de son amour pour Élisabeth de Valois (sa "maman"), mourra dans le cachot de son assignation à résidence, en 1568. Avant cela, regardant le paysage ceinturant Madrid, Don Carlos, méditatif, inconscient des dangers qui l'attendent, en dit qu'il "Est tout à fait à mon goût. Tout y est / Calme, comme un mystère." On se laisse bercer...

3. B. Traven (? - 1969), Le gros capitaliste, 1955, Libertalia, 2018 (trad. de l'allemand Adèle Zwicker), 39 pages, 3 euros. À ce prix, à ce faible nombre de pages: cadeau idéal pour le petiot qui n'a pas encore fait connaissance avec les "navires de papier" (Claudio Magris, ça) qui emmènent haut et loin. B. Traven, auteur du Trésor de la Sierra Madre, rebelle à toute tentative de flicage identitaire, révolutionnaire jusque dans les battements du cœur: parmi les quatre courts textes réunis ici, sa lettre aux résistants républicains lui demandant, 1938, des contributions écrites et lui qui répond que cela ne servirait à rien, ce qu'il leur faut, ce ne sont pas des mots, mais des avions, des mitrailleuses, des munitions, ajoutant qu'il est par contre prêt à leur envoyer quantités de livres de sa bibliothèque: "Revues et livres sont utiles pour les hôpitaux, les tranchées, les camps et les écoles où l'on forme de nouveaux officiers." Petiot aimera, j'en suis sûr.

4. Maurice Schumann (1911-1998), La voix du couvre-feu - Cent allocutions de celui qui fut le porte-parole du Général de Gaulle, 1940-1944, Librairie Plon, 1964, 334 pages, 13,90 FF (2,50 euros aux Petits Riens). Lu dans le cadre d'une étude en cours. Deux choses instructives parmi beaucoup d'autres: le terme de collaboration, ainsi, systématiquement mis entre guillemets pour indiquer que "la langue hitlérienne" en a dévoyé le sens usuel "dans le monde civilisé". Pour Schumann, "collaboration" avec l'Allemagne égale "intelligence avec l'ennemi". Idem aujourd'hui avec le patronat, qui affectionne le terme pour désigner ses employés? Et puis, un peu intrigant tout de même: ce recueil a été publié en 1964, dans quel but? Schumann était alors simple député; gaulliste jusqu'à la moelle, il entrera à nouveau dans la résistance en 1992 en s'opposant au Traité de Maastricht et en fondant l'Alliance pour la souveraineté de la France...

5. Julien Gracq (1910-2007), en lisant en écrivant, 1980, éditions José Corti, réédition 2015, 267 pages, 20 euros. Un livre à lire, et surtout relire, à petites doses. Ce sont ici les grands classiques que sont Balzac, Stendahl, Flaubert et Zola (Proust, aussi) que, de main de maître, Gracq invite à connaître dans l'intimité de leur style. Sur Balzac: sa "coulée verbale", ses "grâces éléphantesques"; sur Proust, ses "tics d'époque"; sur Huysmans, dont l'œuvre est comparée à de "somptueux éboulis de livres"; sur notre faible capacité intellectuelle humaine (trop humaine) qui se manifeste dans le fait que "la seule chose qu'on ne voie pas est celle qui crève les yeux". On peut accumuler les traits et perles sorties de cette intelligence supérieure, ils sont à toutes les pages, et donc, façon livre de chevet, c'est à relire et encore relire.

6. Lessing (1729-1781), L'éducation du genre humain (1777-78) précédé des Dialogues maçonniques (1778), Aubier - Éditions Montaigne, collection bilingue, 1968 (trad. P. Grappin), 135 pages, 4 euros (bouquinerie Het Ivoren Aapje). Lessing, que Grappin donne comme "le premier des grands «humanistes» de l'Allemagne classique", est un auteur bien difficile à trouver aujourd'hui en librairie. Il est loin d'être seul dans ce cas. D'une érudition pénétrante (voir son Laocoon, 1766, chez Hermann, disponible) et d'une rare ouverture d'esprit pour l'époque (voir son Nathan le Sage, 1779, en poche bilingue GF Flammarion 1997, disponible), Lessing ne manquera pas d'étonner plus d'un avec ce petit "bréviaire" où l'éducation de l'individu est mise en parallèle avec celle, par le biais de la Révélation biblique, de l'humanité. Y compris par cette périodisation historique dans laquelle, en première étape, l'enseignement chrétien a d'abord "élu" le peuple juif, au motif qu'il était "grossier, si peu habile à manier les idées abstraites", pour ensuite user du tremplin offert par les Chaldéens et Perses, plus subtils, élevant ainsi la doctrine aux sommets neigeux de "l'immortalité des l'âme", ce qui permettra, en troisième phase, son extension "christianique" à l'humanité entière. À l'époque, cela ne détonnait pas. Mais Lessing, en même temps, comme indique Grappin, tient du "protocommuniste", la phase supérieure et ultime de l'humanité étant à ses yeux "une communauté d'hommes pour qui l'appareil extérieur d'une religion n'est plus nécessaire, pas plus que l'appareil de coercition d'une autorité politique". Ce que Marx plus tard qualifiera de "règne de la liberté".

Sur Nathan le sage, on trouvera ici même un aperçu: http://www.erikrydberg.net/articles/tralala-akbar

7. Hubert Beuve-Méry (1902-1989), Réflexions politiques 1932-52, Seuil, 1951, 254 pages, 1 euro. Relu, encore en vue de l'étude en cours: le fondateur du journal Le Monde et du Monde diplomatique exprime en ces années-là d'assez étonnants points de vue, sur Hitler, par exemple, dont il salue le "génie indéniable" et son action faite de "persévérance, de courage et d'audace". De même au sujet du régime nazi dont il dit qu'il conviendrait de "distinguer ce qui est sain dans le national-socialisme et ce qui est frelaté, ce qui appartient aux révolutions nécessaires et ce qui relève des vieux mythes germaniques". Beuve-Méry n'était pas gaulliste, mettons (mais bien viscéralement chrétien). Sur bien d'autres points, par contre, il vaut d'être relu avec profit: relativement à ses espoirs, la géopolitique des "deux blocs" s'installant (1946), de voir l'Europe opter pour le non-alignement, ou une stricte "neutralité" pour utiliser ses propres termes, mais sans trop y croire: "Mieux vaut donc ne pas se leurrer. Il y a peu de chances que l'Europe reste vraiment européenne. Il y en a beaucoup au contraire qu'elle s'américanise rapidement (..)". Entre-temps, chose faite.

8. Pierre Hebey (1926-2015), La Nouvelle Revue Française des années sombres, 1940-41, Gallimard, 1992, 425 pages, 7 euros (bouquinerie Oxfam). Lecture résultant du dada signalé (étude en cours). C'est l'époque d'occupation nazie en France, le collabo Drieu de la Rochelle reprenant la direction de la célèbre NRF (tout sauf clandestine, version épurée de toute "infection" juive: exit Benda, Eluard, Wahl...), le tout baignant dans un "racisme ordinaire" ambiant. Gide notera, 1940, "Si la domination allemande devait nous assurer l'abondance; neuf sur dix Français l'accepteraient, dont trois ou quatre avec sourire." Et puis encore: "Qui sait, peut-être faisons-nous tort à Hitler en pensant que son rêve final n'est pas l'harmonie du monde?" Bon, un peu gâteux, le Gide - ce n'était pas le cas de tous les autres, les Jouhandeau, Aymé, de Jouvenel, Morand, Suarez, Giraudoux & Cie qui feront de la bonne fortune brune bon cœur, même un Alain que ce livre ne fait qu'à peine égratiner et au sujet duquel Onfray vient de sortir un titre non équivoque (Alain, les Juifs, Hitler et l'occupation), cependant que, déjà, Léautaud, en 1940, le qualifiait de "sot prétentieux" et de "médiocre dans toute son acceptation". Voilà qui rafraîchit la mémoire, y compris au sujet du Front national, organisation de résistance fondé le 15 mai 1941, entre-temps piraté par l'extrême-droite française comme on sait. Terminons par une perle d'anthologie, le verdict de Claude Roy sur un écrivaillon dont on taira le nom: sa prose "retransmettait en morse un message chiffré que Saint-Just avait transmis à Nietzsche qui l'avait transmis à Spengler qui l'avait passé à Malraux qui l'avait codé en chinois et répercuté en allemand sur le radar danois de Kirkegaard." On savait écrire...

9. Nicolaï Mikhaïlov (1906- ?), Le repos n'est qu'un rêve, 1970, Éditions du Progrès (Moscou), 302 pages, 3 euros. Un des faits curieux dans cet historique de l'engagement héroïque de la jeunesse soviétique dans la "grande guerre patriotique" 1941-45, richement illustré de photos, est la date de publication, 1970. Donc, un quart de siècle après, le "devoir de mémoire" reste impérieux. Remarquable aussi, à même date, ces quelques pages inquiètes à propos d'une nouvelle tendance littéraire, apparue à ce moment, jugeant opportun de tourner le dos aux personnages d'exception, modèles d'émulation communiste, pour, plutôt, dépeindre les "petites gens", ternes et faillibles. Pour le dire autrement, il s'agissait de "déshéroïser" la production romanesque. C'est en quelque sorte annonciateur de 1989-1991. Le plaisir est d'autant plus grand de suivre ici ces très jeunes héroïnes et héros, allant au front, comme partisan, tireur d'élite, pilote de chasse ou "simple" propagandiste, à un âge où il eût été plus normal d'user culotte ou jupe sur les bancs de l'école. Mikhaïlov dit à un endroit une belle chose qu'on fera bien de punaiser devant la table de travail: "La sagesse ne consiste pas à tout savoir. Ce serait d'ailleurs impossible. La sagesse consiste à savoir ce qui ne doit pas être ignoré." Son livre y aide.

Sur l'auteur: https://encyclopedia2.thefreedictionary.com/Nikolai+Mikhailov
Sur Zoïa Kosmodemyanskaïa, jeune martyre, sauvagement torturée avant exécution par les nazis:
http://www.executedtoday.com/2007/11/29/1941-zoya-kosmodemyanskaya/

10. Jean-Michel Delacomptée (né en 1948), Notre langue française, 2018, Fayard, 207 pages, 20,55 euros. Farouche défenseur de "l'archéolangue" de la belle littérature et pourfendeur des "progrès de l'inculture qui décervelle une jeunesse au lance-flammes par les professionnels du vide", Delacomptée donne un chiffre qui résume tout: l'enseignement de la langue, en France, a été rabotée, par lesdits professionnels, bureaucrates de l'éducation, à hauteur "de deux années pleines sur l'ensemble du parcours". On cherchera en vain une théorie mais complot, il y a, c'est sûr. Incriminée, en tête des chefs d'inculpation, "l'invasion du numérique", ce qui n'est guère pour étonner; demeure par contre, laissée hors de l'analyse, la surprenante absence de tout délibération politique sur l'attitude à prendre devant les forces de cette invasion. Lecture utile pour se changer de la "société de bavardage" comme la nomme Delacomptée.

11. André Pézard (1893-1984), Le Convivio de Dante, 1940, réédition annotée par Jean-Louis Poirier aux Belles Lettres, 2018, 212 pages, 35 euros. Je me suis juré de relire quand je serai vieux, passé quatre-vingt ans, mettons. Là, ça me dépasse: décodage savant d'un texte inachevé (vers 1302-1307) de Dante dont ne subsiste qu'une seule version corrompue de copiste peu fiable. Pézard est un adepte de la lectio difficilior, ce qui est logique ayant à travailler sur un texte de copiste donné comme "difficultueux" (garder ce mot précieusement!), et le résultat s'adresse, dit le préfacier, à un "public éclairé". Quand on lit ce genre de prose, qui mêle italien médieval, français pincé et latin sans traduction, on se sent un peu con. Ça fait du bien.

12. John Berger (1926-2017), Voir le voir, 1972, Éditions B42, 2014 (trad. Monique Triomphe), 167 pages, 22 euros. Encore Berger! Ben oui, encore, honni soit qui s'en lasse: cette série d'exposés donnés à la BBC, ici enrichie de centaines de reproductions photographiques (format timbre-poste), invite à un voyage dans l'art, grand et petit "a", d'évidence, à toute époque au service des "intérêts idéologiques de la classe dominante", la peinture à l'huile ayant eu pour fonction de faire "aux apparences ce que le capital fit aux relations sociales. Elle réduisit tout à l'égalité des objets." et, en effet, "le modèle qu'elle représente n'est pas tant une fenêtre ouverte sur le monde qu'un coffre-fort encastré dans un mur, coffre-fort dans lequel on a déposé le visible", ce qui est également vrai de son médiocre avatar contemporain, la publicité, qui vient compenser "l'interminable présent que constituent les heures de travail sans intérêt [par] un avenir rêvé dans lequel l'activité imaginaire remplace la passivité du moment"... La "pub", rappelle Berger, "exerce une influence énorme et constitue un phénomène politique d'une grande importance." Ah! Mais c'est comme "l'invasion numérique" dont causait Delacomptée! Le politique n'en a rien a cirer, ni de l'une, ni de l'autre. En bordure du chemin de fer acheminant quincaillerie et le "software" qui va avec, il regarde passer. Meuuuhhh.

13. Claudio Magris (né en 1939), Classé sans suite, 2015, L'Arpenteur/Gallimard (trad. Jean et Marie-Noëlle Pastureau), 473 pages, 24 euros. La promo de 4e cite Mario Vargas Losa jugeant Magris comme "l'un des plus grands écrivains de notre temps"; on aurait préféré l'avis, pour une fois changer, de Marcel Machintruc, conducteur de tramways. Mais, certes, il est beau et grand ce livre inrésumable qui pivote (par le biais d'un fantasque collectionnaire de débris guerriers qui voulait tout réunir dans un Musée de la Guerre, mais il hésitait: de la Haine?) autour de Trieste et de son camp d'extermination, le seul sur sol italien, au bas mot quelque 5.000 morts gazés, fracassés à la masse ou réexpédiés direction Auschwitz, un camp que tous, des tortionnaires Allemands jusqu'au commandement Alliés, ont balayé sous le tapis de l'oubli: pour reprendre le cri du cœur de Magris, ce n'est pas tant contre l'oubli qu'il faut lutter, "mais contre l'oubli de l'oubli". Trois mots reviennent ici à toutes les pages: puanteur, sang et mort: de la traite négrière aux politiques génocidaires, sans cesse "le train de l'Histoire a mauvaise haleine", il broie tout sur son passage avec une prédilection pour les pauvres et les faibles. Bonne chance à qui voudrait lever un coin du voile ensanglanté: "L'univers entier est la copie retouchée de qui sait quel autre monde." Inutile de chercher un coupable, ce sera, comme rappelle le titre de ce roman à peine fictionnel: "classé sans suite". Circulez, il n'y a rien à voir. C'était sans compter avec Magris...

14. Pablo Neruda (1904-1973), Résidence sur la terre, 1925-1945, poche Gallimard (trad Guy Suarès), 1979, 215 pages. Un pis-aller, rien ne remplaçant l'édition bilingue pour goûter la saveur intraduisible de l'original. J'ai lu à la manière du crabe, de la fin jusqu'au début, à reculons, et donc en commençant par les hymnes de la Troisième résidence (1935-45) à la gloire de l'Armée rouge ("Je suis né pour chanter Stalingrad."), des Brigades internationales (les combattants arrivant un "matin de brume" en Castille, "fermes et silencieux / comme les cloches avant l'aube") et à la fière Madrid ("Vous allez demander: Où sont donc les lilas? / Et la métaphysique couverte de coquelicots?") et à l'ami Garcia Lorca ("Parce que pour toi l'on peint en bleu les hôpitaux / et poussent les écoles, les quartiers maritimes, / et les anges blessés se peuplent de plumes ..."). Dans "premières résidences" que Neruda reniera par la suite dixit son préfacier Julio Cortazar, le souffle océanique du poète est pourtant bien là, en ses "chambres abandonnées" que squatte la lune, entouré des "araignées personnelles" à contempler, tel un "autel confus", les "sciences du sanglot". C'est noté dans mon calepin: trouver l'édition bilingue.

15-17: Tove Jansson (Muminpappans memoarer, 1950, 269 pages), Sara Lidman (Gruva, 1968, 137 pages; reportage de l'écrivaine prolétarienne aux mines de LKAB, siège d'une des plus grandes grèves de mineurs en Suède, 1969-70), Lars Forssell (De rika, 1976, 135 pages). Pour mémoire.

Statistiqueries. La vente de gazettes en France, c'est une chute de 50% en volume (soit autant, 50%, d'invendus) et les "points de vente", ce n'est pas mieux, ils étaient 30.000 en 2008, il en reste 23.200, le pronostic étant: extinction au rythme de 600-750 l'an (Le Journal du Dimanche, 4 mars 2018). En Russie? Au détour d'un dossier "thématique", le journal Le Monde (21 mars 2018) indique que le nombre de librairies en URSS, peu avant la débâcle, s'élevait à 80.000; il ne sont plus que 15.000 aujourd'hui. La faute à Poutine, c'est sûr. L'écrivain Patrick Grainville, de son côté, s'inquiète un peu de "l'effondrement de la langue" en France, dû largement à "l'anglo-américain d'Internet, du commerce et des affaires [qui] envahit tout." (La Libre, 12 mars 2018). La moisson du mois de mars, plutôt riche: 4.146 pages. Et grâce aux amis de cette chronique et leurs conseils, d'autres pages attendent: la réédition chez Manucius du 3e livre de De nature rerum de Lucrèce (dont les éditions Delga viennnent de sortir la biographie du toujours excellent Luciano Canfora) et puis, à relire, les plaidories de Cicéron contre Verres (aux Belles Lettres 2015). Un autre ami cher conseille L'esthétique de la Résistance de Peter Weiss, "tout à fait brillant" - il en a été question dans cette chronique (lectures de décembre 2017) et, encore bientôt, en long et en large, dans ma recension pour la revue Lava (n°4 - 2018) https://lavamedia.be/fr/.